Aurore Peeters
Voici, comme prévu, la 1e étape de mon Défi Rencontre. Pour rappel, je me suis lancé cette année un défi fait de portraits de femmes inspirantes, à raison d’une interview par mois (cf. mon article “Le défi féministe 2020“).
Qu’est-ce qu’une femme inspirante selon moi ?
Et bien, c’est une femme qui a su se trouver et réussir tout en étant en accord avec ses valeurs.
Je suis donc heureuse d’avoir pu interviewer par téléphone Aurore Peeters qui, selon moi, correspond bien à cette définition.
Laissez-moi vous la présenter.
Son portrait
Une voix enjouée, dynamique. Voici ma première impression quand je l’ai eue au téléphone.
Aurore est une jeune maman et belle-maman de 41 ans, qui s’épanouit aujourd’hui grâce à des choix personnels et professionnels en accord avec elle-même.
Aurore se décrit comme obstinée, avec de la personnalité mais toujours de la bienveillance qui se traduit dans plusieurs domaines comme les choix éducatifs.
Elle se dit bavarde aussi. Je confirme :). Et cela m’allait bien, je l’avoue, pour une première interview.
Aurore est entrepreneure. Mais avant de se lancer dans l’entreprenariat, avant de se trouver vraiment, elle a vécu plusieurs vies professionnelles.
Plusieurs vies professionnelles
Tout d’abord, elle a réalisé un parcours scolaire très diversifié : bac technologique, fac de philosophie, BTS Communication des entreprises, puis école de commerce en alternance.
Puis, elle connut dans un premier temps une vie professionnelle toute aussi plurielle.
Première étape : le luxe et les grands couturiers sur Paris à l’âge de 21 ans.
Toutes les petites filles ou presque n’en ont-elles pas rêvé ?
Pour Aurore, il en fut tout autrement. Elle n’y retrouvait pas ses valeurs, notamment en termes d’éthique.
Elle part donc et s’essaie à autre chose.
S’ensuivent alors de nombreux contrats de travail notamment en tant que Responsable Communication ou Marketing dans différents secteurs d’activité (automobile, associatif, transport…).
Avant de décider d’arrêter et de se poser la question de cette insatisfaction permanente.
Pourquoi n’arrivait-elle pas à se poser ?
Elle comprit qu’elle avait besoin d’être en accord avec elle-même, avec ses valeurs.
Finalement, elle le savait déjà au fond d’elle-même mais elle avait peur de se lancer.
Le choix professionnel
Elle commencera à y toucher du doigt avec l’aventure Brainscape, un escape game créé avec 6 autres personnes sur Rouen. Sa première entreprise.
Là encore, elle ne s’y retrouve pas complètement. Après un temps de réflexion, elle fera une nouvelle tentative dans l’entreprenariat.
Elle lancera, avec deux nouveaux associés, Time Block à Val de Reuil, le seul Escape Game de l’Eure qui propose également des séminaires pour entreprises. C’était il y a maintenant 3 ans.
Avec ses associés, elle aura tout fait pour pouvoir se donner les moyens de réussir cette nouvelle aventure : faute de moyens suffisants, ils ont monté eux-mêmes les murs, créé les différentes salles et les scénarios.
Aujourd’hui, la gestion quotidienne de Time Block est assurée par une seule personne. Aurore intervient essentiellement pour les gros séminaires.
Cela lui permet de se consacrer à son autre entreprise : Jeux et Légendes.
Au programme : création de jeux, écriture de scénarios, accompagnement des chantiers, formation…
Pourquoi avoir choisi l’entreprenariat ?
Au carrefour de sa vie, on regarde son organisation, on se demande ce que l’on veut réellement, comment être en accord avec ses valeurs.
« Et qu’est-ce qui est vraiment précieux finalement sinon le temps ?
Car le temps est le seul paramètre qui nous est vraiment compté. Nous pouvons essayer de le prolonger en ayant une certaine hygiène de vie mais nous ne maîtrisons pas la durée de notre vie.
Or, aujourd’hui, à quoi consacrons-nous les meilleures heures de nos journées ?
A notre travail
Pourtant, ce temps pourrait être consacré à notre famille, à aller bien. »
La liberté et l’autonomie
Etre entrepreneur signifie la liberté d’organiser ses journées selon ses propres priorités.
« C’est prendre le temps de préparer un gâteau pour le 4 heures, de presser soi-même du jus d’orange…
C’est pouvoir garder son enfant quand il est malade sans se justifier ou se sentir coupable.
C’est choisir de se promener en bord de mer l’après-midi et travailler plus tard. »
C’est ne plus avoir des semaines type de 35 heures. Une semaine pourra faire 20 heures comme 70 selon les besoins. »
Définir et suivre ses propres règles
Selon Aurore, dès notre plus jeune âge, dès l’école, on nous apprend à suivre des règles communes. Et cela se poursuit en entreprise, où des règles qui te semblent dénuées de sens sont définies et te sont imposées.
« Cela ne me convenait pas. Je voulais définir mes règles, fabriquer mon propre système. »
Cela semble idéal ?
« Attention, il faut accepter de vivre sans filet (sécurité financière, retraite non assurée, inquiétude vis-à-vis de ses enfants…). Cela fait peur. Nous sommes conditionnés pour avoir peur de cette insécurité. »
Aurore explique que tes revenus sont variables indépendamment de l’énergie que tu mets dans l’activité.
On y perd parfois financièrement même en travaillant plus, notamment au début. Mais on y gagne en liberté, en autonomie, en qualité de vie et en accord avec soi.
Le fait d’être une femme a-t’il eu un impact pour toi ?
Le plus compliqué a certainement été d’asseoir sa légitimité, surtout dans des contextes masculins.
« Car il y a beaucoup d’hommes dans l’entreprenariat. Lors d’une réunion de chefs d’entreprise à laquelle j’ai assisté, il y avait seulement 2 femmes sur les 20 personnes présentes.
Il y a bien eu quelques blagues sexistes mais c’est aussi le reflet de la société d’aujourd’hui.
Il faut s’affirmer. Une fois que la légitimité est gagnée, cela se passe bien. »
A côté de ça, Aurore a fait de belles rencontres. Il existe une véritable solidarité féminine.
Une journée type ?
Selon Aurore, il n’y a pas de journée type au sens propre du terme car aucune journée ne se ressemble complètement.
Par contre, elle a mis en place une véritable organisation établie à l’aide d’un rétro-planning sur lesquel elle place ses gros chantiers (durée entre 2 et 6 mois en règle générale). Cela lui donne une vision à mailles mensuelles et hebdomadaires.
Pour le reste, elle essaie de respecter certains rituels.
Sa matinée commence par le départ à l’école pour y déposer son fils vers 08h30.
A son retour, jusqu’à 10 heures, elle traite les mails, les urgences, les appels. Elle préfère réaliser l’administratif le matin.
Le reste de la journée est consacré aux chantiers en mode écriture. La difficulté : les idées viennent plus ou moins facilement.
Le mardi après-midi, elle se rend en ville pour préparer l’enquête des P’tits Sherlock qu’elle animera le lendemain à l’Ecole des Passions à Trouville.
L’Ecole des Passions permet aux enfants de découvrir un métier durant une matinée avec un représentant de la profession.
Aurore y anime « Les P’tits Sherlock » qui consiste à découvrir le métier d’enquêteur. Au programme : une enquête dans la ville suivie d’un atelier pour apprendre à écrire des énigmes.
Le reste de la semaine est consacré aux entreprises privées et leurs projets.
Elle se rend également occasionnellement chez Time Block à Val de Reuil.
Son temps est maintenant partagé entre son domicile (80%) où se trouve son entreprise Jeux et Légendes et ses déplacements chez les clients (20%).
Toujours par souci de protéger sa vie de famille, elle a dédié l’un des étages de sa maison à son entreprise.
Des choix de vie traduisant ses valeurs
Aurore est convaincue que lorsqu’on veut changer de vie, il s’agit d’une démarche globale. Ce n’est pas axé sur un seul aspect de sa vie.
Pour preuve, Aurore ne s’est pas contentée de changer de vie professionnelle. Elle a également enclenché d’autres changements profonds.
L’éducation
Aurore s’est toujours intéressée à l’éducation, notamment les modes d’apprentissage alternatifs (ex : Montessori).
Elle a ainsi créé L’écolier libre.
« Ce n’est pas une association. Je ne voulais pas de système pyramidal. C’est un mouvement citoyen que chacun est libre de rejoindre pour en devenir le porte-drapeau. »
L’Ecolier libre, c’est une proposition de mode d’apprentissage différent qu’Aurore est venue porter aux écoles de Louviers.
Pour cela, elle a investi dans des boîtes éducatives dont elle a fait don aux écoles.
Pour en faciliter l’utilisation, elle organisait aussi des rencontres entre professeurs pour qu’ils puissent échanger entre eux leurs retours d’expérience…
Elle a reçu un bel accueil mais la décision n’était pas complètement à la main des écoles.
Elle a donc rencontré des élus. L’accueil fut plus mitigé de ce côté-là. Aujourd’hui, Aurore n’a plus le temps de s’y consacrer, d’autant qu’elle a déménagé entre temps. Néanmoins, le projet n’est pas pour autant passé aux oubliettes. En effet, l’un des élus s’engage à mettre en place cette démarche s’il passe aux prochaines élections.
A suivre.
La nature
« Je n’ai jamais aimé les grandes villes. Ce n’est pas pour moi. » déclare Aurore.
Avec son emménagement récent dans une maison nichée sur les hauteurs de Trouville, elle a retrouvé avec plaisir la nature, la mer. Un cocon de nature à l’abri des regards, avec un voisinage essentiellement composé d’auto-entrepreneurs et de restaurateurs, loin de l’agitation touristique.
Mais son amour de la nature ne s’arrête pas là.
Il se traduit également par de nouveaux comportements éco-responsables, la conscience qu’il faut cesser de surconsommer car il n’y en aura pas toujours pour tout le monde.
Elle a ainsi réduit drastiquement sa consommation de viande rouge pour des raisons écologiques et éthiques.
Elle a aussi abandonné les achats de produits de beauté comme le maquillage ou les teintures. Aucun besoin de se cacher derrière des artifices féminins.
Elle a créé son potager qui lui permet d’être auto-suffisante sur certains légumes de saison. L’arrivée prochaine de poules lui permettra de l’être en œufs. Elle prend plaisir à boire chaque matin des oranges fraîches qu’elle aura pressées elle-même. Elle essaie de consommer le plus possible des produits frais et locaux.
Et petit à petit, elle engage de nouvelles habitudes qui la rapprochent un peu plus de ses valeurs de vie.
Ta plus grande fierté ?
« Ce serait d’avoir réussi, d’avoir trouvé un équilibre dans ma vie, d’être en accord avec mes valeurs, avec ce que je suis. »
Et si tu avais des conseils à donner ?
- Croire en soi, ne jamais douter de ses capacités
- Ne surtout pas lâcher, tenir même si c’est parfois compliqué, que l’on doute – ai-je fait le bon choix ? – et qu’on est tenté de tout envoyer balader.
- Lors de son changement de vie, s’entourer de personnes bienveillantes qui sont là pour t’encourager avec lesquelles tu pourras discuter librement. Un mari, une famille ou des amis.
- « Réseauter », intégrer des groupes d’entrepreneurs pour y trouver le soutien et la bienveillance de personnes qui vivent ou ont vécu les mêmes expériences.
- Se détacher du concept de bonheur tel qu’il nous est vendu chaque jour. Dans « être heureux », il y a avant tout « être » et non posséder. Le vrai Bonheur est en soi. C’est là qu’on doit le chercher.
- S’inscrire dans le présent, être bien dans l’instant, savoir apprécier les moments. Je ne sais pas encore ce que je ferai demain. Ce sera peut-être différent.
Une nouvelle aventure ?
Aurore déclare qu’elle a encore beaucoup de choses à mettre en place pour parvenir à atteindre tous ses objectifs.
Son parcours me fait dire qu’elle devrait y parvenir.
Propos recueillis par Sophie Willocquet le 16 janvier 2020
Portrait de femmes inspirantes – Votre avis ?
J’espère que vous avez apprécié ce portrait. Je vous donne rendez-vous le mois prochain pour une prochaine rencontre de femme inspirante.
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Au plaisir de vous lire.
A bientôt.
Sophie
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